Comprendre la ménopause et ses impacts
La ménopause est définie comme l’arrêt définitif des règles durant 12 mois consécutifs, généralement entre 45 et 55 ans, marqué par une chute prolongée d’abord de la progestérone puis des oestrogènes.
Symptômes physiques et psychologiques
Les principaux symptômes incluent : bouffées de chaleur ( 65,9 %) , sueurs nocturnes, troubles du sommeil (49,6 %) , fatigue, prise de poids surtout autour de l’abdomen, cellulite qui s’accumule, baisse de densité osseuse et troubles cardiovasculaires, inconfort articulaire et musculaire (88,5 %) (3), perte de cheveux ou cheveux qui s’affinent, étourdissements et vertiges.
A ceci s’ajoutent de nouveaux symptômes comme le syndrome de l’épaule froide (Frozen shoulder) que l’on impute dans les dernières évaluations (Green Scale) à la privation oestrogénique. Ce syndrome limite l’amplitude des mouvements actifs et passifs : les patientes atteintes ont du mal à tourner leur bras ou leur épaule vers l’extérieur, peinent à étendre le bras affecté ou à le placer derrière le dos. Outre la douleur qui limite les mouvements du bras, elles ont également la sensation d’être coincées.
Les activités simples de la vie quotidienne comme peigner ses cheveux, se faire un chignon, atteindre des objets au-dessus de la tête, dormir sur le côté sont perturbées.
Sur le plan psychique : irritabilité (45.1 %), anxiété ( 39,8 % ), troubles de l’humeur ( 46 %), baisse de concentration, voire confusion «brain fog», impression de ne pas être appréciée à sa juste valeur (1) (2).
Une revue systématique note que les symptômes somatiques concernent plus de 52 % des femmes en post-ménopause, contre 39 % en périménopause et 34 % en préménopause; le syndrome génito‑urinaire (sécheresse, dyspareunie, infections urinaires) affecte 55 % en post-ménopause (4).
Un faible soutien social, un stress élevé au travail ou dans la vie familiale, ou une intelligence émotionnelle limitée de l’entourage augmentent la sévérité perçue des symptômes.
Pourquoi cette souffrance reste méconnue ?
Malgré son impact majeur, la ménopause mais aussi surtout la longue période de la périménopause restent souvent mal comprises et insuffisamment prises en charge.
Le biais de genre dans la médecine (5) conduit fréquemment à minimiser les symptômes des femmes péri, pré-ménopausées ou ménopausées, perçues comme anxieuses ou souffrant de pathologies psychiatriques. Les symptômes cognitifs tels que la fatigue mentale ou les baisses de mémoire ne sont pas toujours reconnus comme liés à la transition hormonale alors qu’une étude très récente (6) a démontré grâce à l’utilisation de marqueurs radiologiques et de neuroimagerie qu’il existait tout d’abord des récepteurs aux oestrogènes dans le cerveau des femmes et que ceux-ci étaient surexprimés lors de la ménopause pour capter chaque molécule d’oestrogène circulant.
Un autre article scientifique rend compte de la nécessité de supplémenter les femmes autour de la ménopause de façon précoce afin de protéger le cerveau et la cognition (6).
En effet, les femmes à la ménopause ont deux fois plus de risque de développer une maladie d’Alzheimer (7) que les hommes au même âge.
En outre, le manque de formation des soignants sur ces problématiques et l’absence de dépistage systématique contribuent au silence autour de la ménopause.
Ménopause : brisons les tabous
Du côté médical, des voix émergent pour briser ce silence. Le Dr Mary Claire Haver, gynécologue installée aux États-Unis et auteure du best‑seller The New Menopause , prône une prise en charge proactive et éclairée des femmes en milieu de vie.
Elle dénonce l’ignorance systémique quant aux symptômes réels de la périménopause et propose une médecine intégrative : nutrition, activité physique, supplémentation et surtout traitement hormonal sur mesure.
Parallèlement, la recherche scientifique sur les effets cutanés de la ménopause progresse. Des travaux récents montrent qu’après l’arrêt des règles, les femmes perdent jusqu’à 50 % de leur collagène en l’espace de cinq ans, avec une diminution d’environ 2 % d’élasticité chaque année. Cette dégradation explique le relâchement cutané, les rides, la sécheresse et la perte de fermeté, autant d’éléments qui participent au sentiment de disparition identitaire que vivent beaucoup de femmes ménopausées.
Il est temps de prendre en compte la souffrance de ces femmes, changer le paradigme visant à faire croire que cette souffrance est inéluctable et fait intrinsèquement partie de la vie des femmes, comprendre les causes scientifiques du dérèglement hormonal mais également des modifications de la texture de la peau, évaluer les pistes de supplémentation orale efficace, notamment à la lumière des dernières études scientifiques et de nouvelle approche holistique et préventive.
L’importance d’une prise en charge précoce
Une intervention tôt dans la périménopause peut limiter les effets physiques et psychiques, et prévenir l’évolution des troubles vers des situations chroniques.
Les « guidelines » validées soulignent que les femmes en périménopause constituent une période de vulnérabilité accrue au risque de dépression majeure, notamment lorsqu’elles cumulent symptômes vasomoteurs et troubles de l’humeur (8).
Un diagnostic précoce, une prise en charge combinant thérapie hormonale, et complémentation orale, ainsi que des interventions sur le mode de vie, améliore nettement la qualité de vie.
Périménopause et ménopause : le bien-être commence à l’intérieur:
On sait grâce aux études faites sur le microbiote depuis plusieurs années (ensemble de bactéries, champignons, virus et leurs gènes présents sur la peau mais également l’intestin) que l’équilibre du “gut” dépend de facteurs génétiques mais aussi environnementaux et nutritionnels.
En effet, outre une alimentation équilibrée (riche en fibres d’origine végétale, en micronutriments et peu sucrée), l’équilibre de ces micro-organismes qui cohabitent en harmonie est associé à des taux élevés en oestrogènes et en progestérone chez la femme.
Aussi, les fluctuations hormonales surtout pendant la période de périménopause (période qui peut atteindre jusqu’à 15 ans avant la ménopause !) impacte négativement la diversité de la flore intestinale (9).
Il a par ailleurs été suggéré par des expériences sur des rongeurs après une ovariectomie que ces modifications du microbiote sont associées à une augmentation de l’adiposité, un ralentissement du métabolisme ainsi qu’à une résistance à l’insuline.
Ces changements microbiotiques ainsi que les conséquences sur le métabolisme sont atténuées par l’administration d’oestrogènes dans le cadre d’un traitement hormonal substitutif (10).
(1)Stress, psychological distress, psychosocial factors, menopause symptoms and physical health in women Rosie Bauld , Rhonda F Brown maturitas.2008.12.004
(2)A review of studies of the psychological symptoms found at the menopause L Dennerstein, G D Burrows Maturitas. 1978 Jun
(3)Chou MF, Wun YT, Pang SM. Symptômes de la ménopause et échelle d’évaluation de la ménopause chez les femmes chinoises d’âge mûr à Macao, Chine. Women Health. 2014
(4)Prevalence of Psychosomatic and Genitourinary Syndrome Among Menopausal Women: A Systematic Review and Meta-AnalysisNik Hussain Nik Hazlina , Mohd Noor Norhayati Front Med (Lausanne). 2022 Mar
(5)Gender and age bias in triage decisions Cynthia Arslanian-Engoren, PhD, RN, CNS April 2000
(6)In vivo brain estrogen receptor density by neuroendocrine aging and relationships with cognition and symptomatology Dr Lisa Mosconi 20 juin 2024 Nature
(7)The Role of Estrogen Therapy as a Protective Factor for Alzheimer’s Disease and Dementia in Postmenopausal Women: A Comprehensive Review of the Literature Noor Ali Rohab Sohail . 2022 Mar
(8)Guidelines for the evaluation and treatment of perimenopausal depression: summary and recommendations Pauline M Maki Practice Guideline Menopause. 2018 Oct
(9)Spotlight on the Gut Microbiome in Menopause: Current Insights Brandilyn A Peters Int J Womens Health. 2022 Aug
(10) Menopause, the gut microbiome, and weight gain: correlation or causation? Becker, Sarah L. Menopause 28(3):p 327-331, March 2021.